Catégorie : Mon accident

  • Mon week-end à Bordeaux

    Mon week-end à Bordeaux

    Tous les ans depuis mon arrivée à Aix en Provence, nous avons pris l’habitude avec mon frère et deux amis très proches de nous retrouver au moins une fois par an pour faire la fête et pour ne pas couper les ponts.

    Depuis mon accident, étant à mobilité réduite, les week-ends se sont déroulés directement chez moi afin de m’éviter les déplacements difficiles.

    C’est la première fois, 30 mois après l’accident, que nous décidons d’organiser le tout sur terrain neutre : Bordeaux.

    Emplacement au top.

    Un de mes amis s’est chargé de la location au plus proche du centre afin d’éviter les marches intempestives. N’oublions pas que je suis encore en béquilles et toujours handicapé. 😆

    Bordeaux est une ville magnifique avec une richesse architecturale qui n’a rien à envier à d’autres villes de France. Mais elle est grande et j’ai peut-être un peu surestimé mes capacités à me mouvoir sans difficulté.

    Le mental, il a des trous comme l’emmental.

    Je me suis rendu compte avant ce week-end que j’avais un mental qui me permettait de réaliser certaines choses en passant au-dessus de la douleur.

    je me suis rendu compte pendant ce week-end que j’avais aussi des failles :

    • Il faut absolument que je sache où l’on va (distance) pour me permettre de passer au dessus de la douleur.
    • Je ne profite pas du chemin. Je travaille sur moi. Je me relâche que quand les objectifs géographiques sont atteints.
    • Je ne veux pas être un frein alors je ne force pas les arrêts alors que j’aurais peut-être du.
    • Je suis limité
    Lors de la visite de la cathédrale, j’aurais peut-être du passer plus de temps à l’intérieur pour me reposer les pieds. Pour ne pas être celui qui bloque, j’ai été le premier à repartir… Erreur de jugement.

    Et boum !

    Moralité, à un moment, la fatigue et la douleur aidant, j’ai explosé sur une futilité. J’ai gâché la fête… Je me suis mis à hurler sur mon frère qui souhaitait recommander un verre.

    J’ai stoppé mes potes dans leur élan alors que j’aurais très bien pu aller me coucher et leur laisser le champ libre. Nous n’étions pas obligés de finir toutes les soirées ensemble et à la même heure…

    Je crois que, dans ces moments de contrôle, je ne contrôle que la douleur et pas mes émotions. Je laisse des émotions négatives prendre l’ascendant sur mon bien-être. Il faut que j’apprenne à les détecter, les analyser et que je sache les atténuer voire les faire disparaitre.

    Pour la petite histoire, juste avant, en sortant du restaurant, nous avions croisé un jeune couple d’une trentaine d’années qui se garait sur une place pour handicapés sans qu’aucun des deux ne le soient bien évidemment. Je me suis permis de faire la réflexion à l’homme qui m’a bien sûr envoyé paitre. Je n’ai pas réussi à faire descendre la pression de ce moment-là de bêtise humaine et d’égoïsme pur et dur.

    C’est sûrement le déclencheur.

    Bilan

    Ça fait du bien de prendre l’air même si ça fait mal et que c’est compliqué à gérer. Je pense que j’ai visé un peu au dessus de mes capacités mentales et physiques du moment. La luminosité baisse, la fatigue automnale arrive, toutes ces petites choses font que j’aurais peut-être du faire moins d’efforts. Lundi, j’ai eu énormément mal à mon pied droit.

    Mais je ne regrette rien, l’amitié vaut le coup de faire des sacrifices, l’amitié d’un frère encore plus.

    Note pour plus tard : Si les potes ne m’en veulent pas trop, il faudra faire ça avec l’arrivée des beaux jours, quand le corps refait le plein de vitamines.

    Merci Frérot, merci les potos… (Private Joke : Bordeaux rosé, le bordeaux mais rosé)

  • Avant l’hospitalisation définitive (ép. 3)

    Avant l’hospitalisation définitive (ép. 3)

    Je suis dans la salle d’attente aux urgences des grands brûlés de l’hôpital de la Conception de Marseille. Des ambulanciers viennent de m’emmener dans ce service à la demande du service de chirurgie vasculaire de l’hôpital d’Aix en Provence.

    Je suis là depuis un petit bout de temps, je suis sur mon brancard et je sens bien que je gène. « C’est qui ce monsieur ? », « Il vient d’où ? », « Qui l’envoie ? », « Ils sont bien gentils à Aix mais ils pourraient prévenir quand ils nous envoient des patients. ».

    Premiers contacts

    L’énervement suite aux difficultés administratives de mon admission forcée passe et je suis pris en charge par Laura, l’infirmière préposée aux pansements du service.

    Laura est une jeune infirmière très professionnelle, elle maitrise son sujet et met le patient au premier plan. Ce premier contact me rassure. Elle a un collier Disney autour du cou, ça parait bizarre mais ça me détend. Elle fait appel, une fois que je suis installé, à la chirurgienne de service : Le Docteur Hautier.

    Le docteur Hautier se présente avec son interne Arthur. Ce sont eux, si je me souviens bien, qui ont découpés mes cloques. J’ai la chair des deux voûtes plantaires à l’air libre. Le nettoyage de la plaie est douloureux, Laura fera ce jour mon 1er pansement.

    Chez vous ou chez moi ?

    J’entends le docteur Hautier expliquer à mon épouse qui est en salle d’attente que 2 solutions se posent à moi. La 1ère, rester à l’hôpital, le pansement se changeant toutes les 48 heures, il faut que je sois là à ce moment là. La 2ème, rentrer chez nous et venir en ambulance tous les 2 jours pour changer le pansement.

    Je n’ai pas envie de rester et, à ce moment, je ne sais pas encore ce qui va réellement se passer, je n’ai aucune conscience de la gravité de ma blessure. La décision est prise, nous rentrons à la maison et je reviendrai tous les 2 jours en ambulance. Des médicaments me sont prescrits, à base de codéine, rien de trop fort pour le moment.

    A la maison

    Je suis en fauteuil roulant, les déplacements seront donc limités, voire inexistants car dès que mes pieds repassent en dessous de mes hanches, la douleur explose (du style intenable). On équipe le fauteuil du salon, j’y ferai ma toilette, j’y passerai mes nuits, j’y prendrai tous mes repas. Mon seul déplacement se limitera aux toilettes, je m’y rends en rampant… (seule différence avec l’escargot, je ne laisse pas de traces :-))

    Pas le droit de poser les pieds au sol, le travail musculaire des bras et des épaules commence. Une chaise est installée dans les toilettes afin que je puisse tendre mes jambes quand je siège sur le trône. Pour éviter la douleur, on garde les jambes tendues.

    Puis je retourne à l’hôpital voir Laura, Arthur et le docteur Hautier pour refaire mes pansements toutes les 48 heures. Il faut savoir que la coagulation du sang génère une matière appelé fibrine. C’est une fibre blanche qui se colle à la surface de la plaie et qu’il faut enlever.

    Douleur quand tu nous tiens

    La fibrine, quand il s’agit de l’enlever, il faut gratter, sur la chair…

    Pour préparer ces grattages, on commence à me donner des médicaments plus forts et lors de l’intervention, on me met le masque avec le gaz « hilarant ». Ça a son petit effet sur les premiers pansements mais plus les pansements avancent et plus la douleur devient intense et les médicaments ne peuvent plus rien.

    Une quinzaine de jours après l’accident, je reviens pour mon dernier pansement, celui de trop. La gaze s’est collée sur la chair, l’enlever est un supplice, je hurle, je pleure, la douleur me tétanise. je suis incapable de bouger mes jambes et mes bras, je tremble, je veux que ça s’arrête.

    Laura stoppe le pansement, elle non plus ne peut plus continuer sans me faire souffrir. Il va falloir anesthésier. Je ne peux plus rentrer chez moi, je suis hospitalisé pour de bon…

    La suite dans mon prochain article : Mes premiers jours à la Conception.

  • Mon arrivée à l’hôpital (ép. 2)

    Mon arrivée à l’hôpital (ép. 2)

    Les pompiers ont été très réactifs. J’ai été amené à l’hôpital d’Aix en Provence au service des urgences à la vitesse de la lumière. Mais pendant le trajet, la douleur s’est réveillée.

    La douleur, la peur et encore la douleur…

    J’ai encore en tête, comme un arrêt sur image, les regards des personnes qui m’ont vu entrer dans le hall des urgences sur un brancard en hurlant, comme s’ils venaient de se rendre compte que ce qu’ils avaient n’était pas si grave. La douleur était à son paroxysme, je n’ai jamais connu une telle chose avant. Je frappais contre les murs, je serrais les dents, je priais pour que cela s’arrête, mais rien n’y faisait. La douleur…

    On m’a mis les pieds dans une bassine avec une eau à 37 degrés afin de les ramener à la température du corps. Pas de cachets, il fallait découvrir ce qui avait été touché. Rien n’est prévu pour ce genre de cas. Imaginez moi, allongé sur le brancard, en train de soulever mes jambes pour que les pieds puissent tremper dans la bassine sans toucher les bords et ce pendant des heures. La douleur…

    Pendant ce temps, un médecin entre, prends mon pouls au niveau des chevilles et m’indique que les artères ne sont pas gelées, on ne me coupera pas les pieds. Tout cela est surréaliste. La peur…

    Ma femme me rejoint, elle ne le pouvait pas avant. Je criais trop, je tapais trop. La douleur est toujours présente, toujours aussi forte, mais je suis lessivé, je ne crie plus, je ne tape plus, je pleure. La douleur…

    A un moment donné, le pronostic vital n’est plus engagé. Je quitte les urgences.

    Ma première chambre.

    On me fait monter dans une chambre dans le service qui leur semble être le plus adapté à ma pathologie : Le service de chirurgie vasculaire.

    C’est là qu’on me donne de la morphine, je tombe endormi en quelques minutes. Le chirurgien passera le lendemain matin.

    Les médicaments font effet, dormir m’a fait du bien, je me réveille sans savoir ce qui va se passer, je n’ai aucune idée du parcours qui m’attend. Une chose s’est produite pendant la nuit, mes pieds ont gonflé, ma voûte plantaire a pris du volume, beaucoup de volume. Du liquide s’est glissée entre la chair et la peau créant une surépaisseur de 3 à 4 cm sous les deux pieds.

    Toute la voûte plantaire est gonflée, y compris les doigts de pieds. Une grande cloque s’est formée en se remplissant d’un liquide transparent. La douleur est faible ce qui signifie que les nerfs ont été touchés. Nous sommes sur une brûlure de type 2ème degré profond ou 3ème degré. La peau est blanche, cartonnée.

    Arrivée du chirurgien.

    Le chirurgien spécialisé en chirurgie vasculaire arrive, constate l’étendu des dégâts et se demande pourquoi on m’a emmené dans son service. Ma place n’est pas ici, elle est, d’après lui, dans un centre de grands brûlés.

    Mon passage à l’hôpital d’Aix en Provence s’arrête ici. Le 25 septembre 2017, lendemain de l’accident, je suis envoyé au service des grands brûlés de l’hôpital de la Conception à Marseille.

    Je suis emmené sur brancard au service des grands brûlés du professeur Casanova. Une nouvelle étape commence ici.

    La suite dans l’article suivant : Avant l’hospitalisation définitive.

  • Mon accident de cryothérapie (ép. 1)

    Mon accident de cryothérapie (ép. 1)

    Tout se passe en avril 2017. Je suis abonné dans une salle de sport. Cela fait un peu plus d’un an que je suis installé dans le Sud.

    Un prestataire exterieur à la salle propose des séances de cryothérapie dans un camion qu’il a aménagé avec une cabine spéciale « Corps entier ». Je suis curieux, on m’a conseillé de le faire, alors je me lance : Rendez-vous est pris le lundi 24 avril 2017 à 17h00.

    Le jour J

    La personne qui m’a conseillé de faire la séance décide finalement de ne pas venir, je propose donc à mon épouse de venir avec moi. Arrivés sur place à l’heure, nous remplissons des questionnaires de santé avec le responsable de la salle de sport, le prestataire est en retard… (1er signe)

    Le prestataire arrive avec son camion, se gare proche de la salle car il doit se raccorder au courant de la salle. Après quelques manœuvres, la prise est trop courte de quelques centimètres… (2ème signe)

    Enfin raccordé, le prestataire refuse que la 1ère personne passe tout de suite, elle vient de prendre le soleil, ce qui est incompatible avec la cryothérapie corps entier. Elle doit attendre 30mn. Mon épouse doit se rendre aux vestiaires, je prends donc sa place…

    Avant la séance, voici quelques phrases prononcées par le prestataire : « Je rentre de vacances, la machine n’a pas fonctionné depuis 15 jours. », « Elle a l’air d’être prête, vous pouvez y aller ». Pas très sûr de lui, pas très pro… (3ème signe)

    La séance

    Je suis équipé uniquement de bottes en feutrine et de mon caleçon. Pas de masque, pas de gants. Dès les premières secondes, je sens que ça me brûle au niveau des voûtes plantaires. J’en fais la remarque au prestataire qui m’informe du caractère normal de la chose.

    Petit aparté : Je fais confiance facilement. Dans le cas présent, je suis face à un professionnel dont c’est le métier. Comme c’est ma première expérience, je ne vais pas à l’encontre de ses conseils.

    Une minute ou deux passent et la gêne s’est transformée en douleur. ça vient par vague, le froid endort puis brûle à nouveau. J’insiste auprès du prestataire. La douleur va grandissante. Il décide de vérifier mes mains. Je n’ai pas la maladie de Raynaud. Pour lui, tout va bien, la séance continue.

    La maladie de Raynaud est un état touchant le flux sanguin vers les extrémités telles les doigts, les orteils, le nez et les oreilles en cas d’exposition à des changements de température ou de stress. Elle n’a pas de cause définie, ce qui la distingue du syndrome de Raynaud, secondaire à une prise médicamenteuse ou à une autre maladie.
    Un des symptômes : une douleur dans la région atteinte. Source : Wikipedia.

    Petit aparté n°2 : Pendant la séance, le prestataire ne s’occupe pas de moi, il est au téléphone, rentre et sort du camion à plusieurs reprises.

    La douleur devient insupportable, je le fais savoir. Le prestataire m’annonce qu’il reste 10 secondes (il en restait en fait 30), il m’amène jusqu’à la fin de la séance et ouvre enfin la porte de la cabine…

    Sortie de la cabine

    Je ne sens plus mes pieds. Le prestataire me demande de m’assoir sur un banc à quelques mètres de la cabine et de garder mes bottes afin que mes pieds se réchauffent. Il a toujours le sourire…

    Entre 30 et 60 secondes plus tard, il m’enlève mes bottes et de l’azote liquide se répand sur le sol du camion. Le sol craque sous l’effet du froid, l’azote liquide est à – 196° C. C’est la panique pour le prestataire qui ne s’occupe que de sa machine, je suis le cadet de ses problèmes.

    Mes pieds sont congelés au niveau de la voûte plantaire sur 1 cm d’épaisseur, il me dit d’aller les mettre au soleil afin qu’il se réchauffent, prend son téléphone et contacte le fournisseur de la cabine pour lui signaler qu’elle a un problème.

    Ma femme et la personne censée prendre ma suite sont effarées par l’état de mes pieds. La cliente suivante court vers la salle de sport pour aller chercher un pull pour réchauffer mes pieds et prévient le responsable de la salle qui, me voyant, a le bon réflexe d’appeler les pompiers.

    Les pompiers arrivent rapidement, tant mieux, parce que la douleur se réveille…

    La suite dans un prochain article : Mon arrivée à l’hôpital.